Les Schubertiades de Schwarzenberg

C’est pendant des vacances d’hiver à Schwarzenberg, dans le Voralberg autrichien, que nous avons découvert que ce village de carte postale organisait chaque année un festival de musique classique, au printemps, pendant l’été et à l’automne. Encore plus étonnant, les musiciens invités sont de prestigieux artistes.

Nous avions donc décidé de nous offrir une semaine de concert en 2020, mais crise sanitaire oblige, c’est seulement la semaine dernière que nous avons pu participer à cet évènement.

Tous les concerts auxquels nous avons participé se tenaient dans la même salle, une grande construction en bois, située au milieu du village. La salle était comble tous les soirs.

Un point à signaler ici, et l’expérience n’est pas nouvelle pour nous… C’est la moyenne d’âge des auditeurs. En général, les spectateurs sont des personnes âgées, voir très âgées. Très peu de jeunes et c’est bien dommage. Les artistes, eux, sont souvent jeunes. La question que je me pose est celle de la relève. Quand cette génération d’auditeurs aura disparu, que deviendront ces concerts si il n’y a plus de public?

De la musique vivante sur un blog audiophile

Je suis comme beaucoup d’audiophiles à la recherche permanente de solutions pour améliorer mon système. Cela fait un moment que j’insiste sur l’importance du local, et du couplage des enceintes avec ce local. Et bien cette série de concert m’a fait découvrir qu’il en était de même avec la musique vivante, et que la salle et la position de l’auditeur avait un impact considérable sur le rendu des instruments. Le petit compte-rendu qui suit est structuré en fonction des concerts auxquels nous avons assistés.

Elisabeth Leonskaja

Franz Schubert : Drei Klavierstücke D946, Sonate D784, Sonate D850

Le site de Elisabeth Leonskaja.

Une pianiste d’origine russe, qui vit en Autriche. Nous sommes assis au quatrième rang, au milieu de la salle, devant le piano. Derrière la piano, une sorte de paravant réflecteur.

Dès les première notes, jouées forte, je comprends que ça va être terrible. Le son est très mauvais, le piano a un son étouffé, pas de graves, pas d’aigus mais un médium extrêmement dérangeant. La pianiste joue sans émotion, violemment, c’est Schubert qu’on assassine ! A la fin de la séance, mon épouse et moi-même sommes atterrés, nous avions bêtement pensé que le piano sonnerait mieux qu’à la maison, ça n’est pas le cas. D’où vient le problème ? La salle, la pianiste ou le piano (Petit clin d’œil à Michel Jonasz) ou bien ce paravant qui à mon avis doit créer des déphasages monstrueux.

Finalement, nous quittons la salle dépités pour rejoindre notre chalet et la quiétude de la montagne.

Marc André Hamelin

Franz Schubert : Divertissement sur des motifs originaux français D823, Sonate D845

Gabriel Fauré : Nocturnes opus 33 1 & 2, Barcarolle Opus 70

Claude Debussy : Préludes

Le site de Marc André Hamelin

Nous sommes assis au sixième rang, légèrement décalés par rapport au milieu.

Tout d’abord, l’artiste… On rentre dans un autre univers, fait de subtilité et d’émotions. Le piano n’est toujours pas parfait, mais sonne infiniment mieux. La réponse d’une place à l’autre semble être très différente. Le concert est globalement satisfaisant et le moral commence à remonter un peu… 🙂

David Fray

Franz Schubert : Allegreto D915, Impromptus D899, Fantaisie en Do majeur D760, Sonate D960

Le site de David Fray

Nous sommes assis eux deuxième rang, côté droit de la salle.

Je trouve le son du piano un peu moins bon que pour le concert précédent, mais bien meilleur que celui de Elisabeth Leonskaja. Le concert est magnifique, avec une mention spéciale pour la grande sonate D960. Beaucoup d’émotion. Ce jeune pianiste français est très sympathique…

Andrè Schuen (Baryton) & Daniel Heide (Pianiste)

Franz Schubert : Le voyage d’hiver

Les sites de Daniel Heide et Andrè Schuen

De jeunes musiciens qui vont faire parler d’eux… J’aime beaucoup cette oeuvre de Schubert, que j’écoute souvent. L’interprétation que nous ont donnée ces deux artistes était, à mon sens, parfaite. Daniel Heide est un parfait accompagnateur, discret, mais soulignant habilement les passages les plus émouvants de cette oeuvre magnifique.

Andrè Schuen va certainement se faire un nom dans ce répertoire. Il vient d’ailleurs de sortir une version excellente de La belle meunière chez Deutsch Grammophone. Son interprétation est très juste, ni trop, ni trop peu de pathos dans une oeuvre déjà très sombre.

Sa voix est puissante, mais là encore, un peu dure à nos oreilles. Je me suis souvent inquiété du réglage de mon installation lors de l’écoute de certains barytons comme Dietrich Fischer-Dieskau. Le concert me confirme que le système n’est pas en cause. Ces voix ont un côté métallique assez spectaculaire qui devient assez rapidement agressif.

Renaud Capuçon (Violon), Victor Julien-Laferrière (Violoncelle) et David Fray (piano)

Frantz Schubert : Sonate Arpeggione D821, Sonate pour violon D574, Trio D898

Les sites de Renaud Capuçon et Victor Julien-Laferrière

Quel programme ! La sonate Arpeggione est archi connue, mais quel plaisir de l’écouter avec de tels musiciens. J’ai trouvé ce jeune violoncelliste formidable, justesse de ton, émotion, et ceci habilement soutenu, comme dans une conversation entre amis, avec le pianiste. Ces deux là s’entendent vraiment très bien. Nous étions au quatrième rang sur le côté droit de la salle et le son du violoncelle était excellent. Le piano me semble toujours un peu difficile, avec ce sentiment de message brouillé dans le médium.

Les premières notes de la sonate pour violon donnent le ton. Renaud Capuçon est un grand maître, il domine l’oeuvre. Son interprétation, sa présence sur scène sont vraiment impressionnants, et le son du violon est magnifique. Que du bonheur…

Enfin, le concert se termine sur le trio. On a du mal à penser que ces artistes ne sont réunis que pour l’occasion. L’entente entre les trois musiciens est parfaite. Une fois de plus, le piano, dans ses interventions, brouille un peu la cohésion du message sonore.

Epilogue

La rencontre avec les artistes est une expérience irremplaçable qui apporte une autre dimension à l’écoute de la musique. Par contre, le concert n’offre pas toujours la qualité du son dont peuvent rêver les audiophiles. Nous avons l’occasion d’écouter des oeuvres symphoniques, ou du piano seul à la Philharmonie de Cologne, et le son est absolument parfait, tant qu’on reste dans les douze premiers rangs. Evidemment, une telle salle bénéficie d’une acoustique très étudiée, ce qui n’est pas le cas de lieux de festivals comme celui des schubertiades. L’expérience n’en reste pas moins très intéressante et montre une fois de plus que la propagation des ondes sonores dans une pièce, qu’elles soient générées par un piano ou des enceintes acoustiques doit être considérée avec attention.